Le liège est une matière passionnante, utilisée chez nous en tant qu’isolant ou pour la décoration. Ce matériau et ses propriétés sont reconnues et appréciées depuis longtemps. En s’intéressant de plus près à la production et à l’industrie du liège, on comprend ce qui en fait un matériau noble et de qualité supérieure.
Rapide historique de l’exploitation du liège :
Le liège est utilisé depuis la nuit des temps (ou presque). On retrouve des traces d’utilisations du liège qui remontent à plus ou moins 3000 avant JC du côté de la Chine. Les utilisations se sont ensuite multipliées entre le 18ème et le 19ème siècle, en particulier en tant que bouchons. Ils ont remplacé les bouchons en plâtre et en résine qui étaient utilisés auparavant.
L’usage de liège aggloméré fait son apparition à la fin du 19ème siècle. Le liège commence ainsi à être utilisé sous des formes différentes, en plaques par exemple.
L’utilisation du liège au sein de nos habitations existe depuis plusieurs siècles. Elle est reconnue par les architectes pour ses qualités acoustiques depuis la fin du 19ème siècle. La démocratisation de son utilisation comme isolant écologique est quant à elle plus récente, et se développe encore aujourd’hui. Si le marché évolue à vue d’œil, l’industrie du liège est également en constante mutation. De nouveaux usages pour le liège apparaissent régulièrement, avec de nombreuses innovations, comme récemment dans l’industrie textile par exemple.
Le liège existe aujourd’hui sous un nombre impressionnant de formes. En effet, il faut chercher pour trouver quelque chose qui n’est pas faisable en liège. Du tissu à l’ITE, en passant par le tapis de yoga, le liège est un matériau particulièrement polyvalent. Les industriels du secteur s’emploient aujourd’hui à tirer le maximum de ce potentiel et offrir un spectre de produit extrêmement varié.
A quoi ressemble le marché du liège aujourd’hui ?
La production et la transformation du liège sont concentrées en majorité au Portugal (plus de 50% de la production mondiale). L’Espagne quant à elle, tient la deuxième place pour l’exploitation du liège. Les pays du Maghreb, Algérie, Maroc et Tunisie viennent compléter le podium. La France et l’Italie se partagent ensuite les miettes.
Le marché du liège est très fortement et étroitement lié au marché du vin. En effet, les plus gros consommateurs de liège sont les plus gros producteurs de vin. Les bouchons étant les produits en liège les plus valorisés. Pour vous donner une petite idée, le kilogramme de bouchon est valorisé en moyenne 40 fois plus que le kilogramme de liège dédié à l’isolation. Ce chiffre peut monter bien plus haut pour certaines qualités de bouchons. Il devient alors facile de comprendre que le liège est prioritairement affecté à l’industrie bouchonnière.
Le marché mondial du liège est fortement impacté par la météo, qui va influer sur la qualité et la quantité de la récolte. En effet, la production annuelle est donc volatile. Elle peut varier très fortement d’une année à l’autre (de 150000 à 300000 tonnes par an soit du simple au double). Ces variations sont d’ailleurs aisément observables dans l’histoire.
Ce facteur météo est quelque chose de très impactant pour nous, qui sommes intéressés principalement par l’isolation en liège. En effet, les produits d’isolation et de décoration arrivent en « bout de chaîne ». Ceci rend cette branche de l’industrie du liège beaucoup plus sensible aux problèmes d’approvisionnements. Chaque récolte un peu faible peut engendrer une pénurie pour les fabricants d’isolation en liège, bien avant de toucher les fabricants de bouchons. Ce mécanisme explique en grande partie la volatilité des prix du liège. De ce fait, une mauvaise année entraine inévitablement une hausse des coûts de la matière première.
Contexte actuel compliqué pour le marché du liège :
Les années précédentes ont été particulièrement sèches, en particulier dans le sud du Portugal, dans la région de l’Algarve. C’est dans cette région que se concentre l’écrasante majorité des plantations portugaises de chêne-liège.
Le liège, qui est donc l’écorce du chêne liège (Quercus Suber) a besoin de chaleur mais aussi d’humidité à certains moments de l’année. Ces moments que l’on peut considérer comme clés, et ce particulièrement à l’approche de la période de récolte pour que l’arbre produise un liège de qualité et suffisamment épais. Les dernières années n’ont pas offert les conditions optimales et les récoltes ont donc été fortement impactées. Comme expliqué plus haut, le marché de l’isolation en liège est un des, si ce n’est le premier marché, à en subir les conséquences avec une forte hausse du coût de la matière première. Cette hausse, entraine de façon inévitable une hausse du prix de vente final pour le consommateur. Et ceci, au même titre qu’une hausse du cours du blé entrainera une hausse du prix de la baguette.
Les autorités locales et les acteurs du secteur cherchent des solutions pour remédier à ces situations de plus en plus fréquentes. Nous pouvons par exemple, citer la récolte du liège, qui est régulée par une législation. Cette dernière va très probablement être modifiée prochainement, pour s’adapter avec plus de souplesse aux dates de récoltes. Ceci étant réalisé pour s’adapter au dérèglement climatique et ainsi optimiser les récoltes en fonction des conditions météos.
Pourquoi pas du liège français ?
La tendance est aujourd’hui à la consommation locale et à la re-localisation des industries. Le marché de l’isolation écologique mais aussi le liège n’échappe donc pas à cette tendance.
Il existe une petite production de liège français, en Corse, dans le Var et dans les Pyrénées-Orientales principalement. Cette production reste cependant très faible (environ 4000 tonnes par an, soit environ 2% de la production mondiale) et est en grande partie exportée vers le Portugal. Les usines de transformation du liège sont aussi quasiment inexistantes sur notre territoire.
Si la production française est largement insuffisante pour satisfaire l’intégralité de la demande, il est cependant possible qu’en achetant du liège au Portugal, un petit pourcentage vienne de France.
Une récolte au rythme de l’arbre…
Puisque c’est de la qualité de cette récolte que dépend le prix du liège, il est intéressant de s’y pencher. En plus de cela, la récolte du liège est quelque chose de plutôt atypique.
Tout d’abord, il faut savoir que la récolte du liège ne nécessite pas de couper l’arbre, ce qui est un sacré bon point pour l’environnement. Ensuite, le liège n’est pas récolté chaque année sur un arbre, loin de là. Le liège est avant tout une affaire de patience.
Lorsque le chêne est adulte, soit une fois sa 25ème bougie soufflée, les récoltes seront séparées par des intervalles de minimum 9 ans. Ceci permet à l’arbre de produire une écorce suffisamment épaisse et ne pas le surexploiter pour ne pas l’affaiblir. Le chêne-liège est un arbre avec une espérance de vie de plus ou moins 150 ans. Si la première récolte a lieu 25 ans après la plantation, ce n’est qu’à partir de la troisième récolte soit 18 ans plus tard au mieux, que le liège aura une qualité suffisante pour être utilisé dans l’industrie du bouchon.
…qui participe à son bien être
Il se murmure aux abords des forêts de chênes liège, que la récolte de l’écorce rallonge significativement l’espérance de vie de l’arbre, jusqu’à 200 voire 250 ans. Cette espérance de vie rallongée permettrait d’atteindre presque 20 récoltes sur la durée de vie de l’arbre. Cette cure de jouvence pour le chêne liège est imagée par les gens du secteur par une comparaison parlante avec la tonte du mouton. Le principe est le même et les bienfaits pour le mouton ne sont plus à prouver, alors pourquoi n’en serait-il pas de même pour le chêne liège ?
Sur le terrain ça donne quoi la récolte du liège ?
La récolte en elle-même à lieu entre mai et août lors de la phase de croissance de l’arbre afin de l’impacter le moins possible. C’est une tâche qui reste très artisanale. S’ils étaient amenés à travailler dans les exploitations actuelles, les leveurs de liège du siècle dernier ne seraient que très peu dépaysés. Les outils mécanisés commencent progressivement à faire leur apparition, mais le plus gros de la récolte est toujours effectuée à la main, avec des hachettes spécialement dédiées à cette tâche.
Une fois la récolte effectuée, les troncs dénudés se parent d’une vive couleur ocre due à l’oxydation. Cela n’altère d’ailleurs en rien l’état sanitaire de l’arbre. Lorsque l’arbre produit une nouvelle écorce, il consomme bien plus de CO2 (jusqu’à deux fois plus). C’est encore un bon point pour l’environnement, puisque l’exploitation du liège peut se targuer d’avoir un impact carbone négatif.
Une fois la récolte effectuée, les planches de liège seront stockées à l’air libre pendant environ 6 mois. Cette période de repos où les planches sont soigneusement et méthodiquement empilées, permet au liège de se stabiliser et aux planches de trouver une forme plus plate pour être ensuite plus facilement transformées.
Voilà donc tout ce qui se passe dans la vie du liège avant qu’il se retrouve par exemple sous vos planchers. Et même avec tout cela, nous n’avons pas encore évoqué les processus de transformation, une fois le liège récolté et séché. Le liège est un matériau noble, souvent cher mais qui présente des qualités indéniables. L’exploitation du liège demande un savoir-faire et une patience hors du commun dans le monde de l’industrie moderne. Ces éléments s’ajoutent à la dépendance de la météo et la volatilité du marché entraînent des prix élevés mais qui se justifient.